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Quand un ruisseau fait l’affaire, 5 mai 2023

Aujourd’hui nous partons sur le Causse Méjean avec l’intention de voir le Gypaète barbu mais avant, nous nous arrêtons à Meyrueis pour faire de mini-courses et passer à l’office de tourisme. Nous commençons par jeter un coup d’œil sur le Béthuzon, ruisseau qui traverse le bourg pour rejoindre la Jonte…

Je scrute les pierres qui dépassent de l’eau pour trouver un Cincle plongeur adulte dont je repère la tache blanche du plastron. Je retourne aussitôt à la voiture pour prendre mon zoom. Quand je reviens il est parti, normal. Mais il a été remplacé par un jeune cincle qui est posé au milieu du ruisseau.

Stratégie : je longe les halles et sors prudemment la tête au dessus du muret. Le jeune cincle est là et attend sa pitance.

C’est un oiseau sorti du nid il y a peu de temps, les bourrelets à la base du bec, ses petites ailes, sa bavette jaune, son plumage gris écailleux le prouvent. Bien que jeune, il sait que le toilettage du plumage est essentiel pour un oiseau qui plonge pour trouver sa nourriture sous l’eau.

En attendant un nourrissage, le jeune s’essaye à la capture d’insectes mais manque de chance ce n’est qu’une exuvie* d’insecte aquatique qui reste collée à son bec.

Un adulte revient avec de la nourriture mais ma présence l’empêche de nourrir son jeune ; je le gêne, c’est manifeste. Aussi je décide de les laisser tranquilles.

Le Cingle plongeur est populairement appelé merle d’eau. Sa silhouette trapue, en forme de boule, sa queue courte et son plastron blanc permettent de l’identifier facilement. Quand il est de dos, il est bien difficile à repérer au milieu des rochers ou sur les berges. Il est la plupart du temps agité de tics : courbettes sur ses pattes, hochements de la queue, clignements de l’œil laissant apparaître une paupière blanche.

Paupières blanches
Plastron blanc
Bande rousse sous le plastron

Le cincle est le seul passereau capable de plonger dans l’eau. Pourtant à le voir, rien ne le destine à cette activité. Il n’a pas de pattes palmées mais sa véritable adaptation réside dans des os pleins et non creux comme les autres passereaux. Pour plonger, il s’aide de ses ailes et une fois au fond de l’eau il marche en général à contre-courant la queue relevée, ce qui le plaque sur le lit du cours d’eau. Il recherche des larves et des insectes aquatiques, des crustacés (gammares, minuscules écrevisses) et des mollusques. La prise de poisson est plus rare, des ruisseaux sans truite hébergent des cincles.

Pas de pattes palmées
Chasser aux ballasts !
Une larve comme proie

En France, les cincles se trouvent sur les rivières, ruisseaux clairs au cours rapide et torrents des régions accidentées. Il est indispensable pour qu’ils puissent s’installer que des rochers ou des pierres affleurent à la surface de l’eau pour qu’ils s’y reposent entre deux plongées.

Atlas des oiseaux de France métropolitaine Editions Delachaux & Niestlé

En hiver, la répartition est la même car les cincles ne sont pas vraiment migrateurs. Seuls des jeunes de l’année peuvent se retrouver en dehors de ces zones mais c’est rare.

Les cincles ont disparu de Bretagne dans les années 1940/50. La dernière preuve de nidification a été apportée en 1979 sur la Vilaine en Ille et Vilaine (35) ; il s’agissait d’un couple sans doute formé par des oiseaux erratiques. La disparition de cette population est liée à la qualité des eaux : égouts, arrivée des traitements chimiques en agriculture, acidification des eaux avec l’enrésinement…

Finalement, remontés sur le Méjean, nous verrons les Gypaètes barbus au nid mais ce couple est formé par deux mâles, une autre histoire à vous raconter plus tard…

Les photos ont été réalisées à Meyrueis sur le Béthuzon et sur la Jonte à Peyreleau/le Rozier

Jean-Luc Enzo

Jean-Luc