L’oasis du Causse, suite 1, 27 juillet 2023
La lavogne de Luc sur le Causse Noir était trop belle pour ne pas nous attirer une nouvelle fois. Nous y revenons pour faire un affût en après-midi, avec l’intention d’y découvrir les oiseaux qui viennent s’y abreuver et s’y baigner…
Arsène, jeune photographe animalier que j’accueille pendant une semaine, sera de la partie. Nous nous installons chacun à notre façon. Arsène s’allonge sous un filet de camouflage, moi je suis assis derrière mon trépied recouvert d’un poncho au camouflage 3D (imitation feuillage) et Cécile sous un poncho 3D à l’ombre des arbres d’une haie. Ne reste plus qu’à attendre les volatiles.
Les premiers sont les Serins cini, ils sont toujours en petite bande ou en famille. Bien qu’étant proches, ils sont bien petits dans le viseur.
Les oiseaux restent méfiants, toujours aux aguets. Malgré nos camouflages, la lentille frontale de nos objectifs les inquiète. Un gros oeil qui les regarde. Le mieux serait de venir chaque jour, ils finiraient par s’habituer.
Certains viennent boire et repartent rapidement. D’autres en confiance se baignent.
Un bruit attire mon attention sur ma gauche : un magnifique jeune Chevreuil mâle (avec ses deux petits bois de velours sur la tête) sort de la haie et se dirige vers l’eau. J’oriente tout doucement le zoom vers lui pour ne pas l’effrayer.
Empétré dans mes filets de camouflage et avec mes gants, je n’arrive pas à dézoomer ni à cadrer verticalement. De plus je ne veux pas faire trop de bruit pour éviter d’alerter le Chevreuil et qu’Arsène puisse profiter de la scène.
Le Chevreuil est intrigué par les déclenchements d’Arsène et la masse du filet de camouflage. Il repart mais revient sur ses pas pour comprendre ce qui se passe.
Finalement, il repart sans pousser d’aboiement d’alerte.
Un petit passereau tacheté comme une petite grive se faufile entre les joncs. C’est un Pipit des arbres, reconnaissable aux rayures fines de ses flancs. A cette époque le Pipit farlouse n’est pas présent sur les Causses, il n’y a pas de risque de confusion.
De jeunes Mésanges charbonnières tentent de venir boire, elles volètent au dessus de l’eau et, sans doute effrayées par leur reflet, elles repartent. Après de multiples allers-retours, elles finissent pas se poser.
Des Bruants proyer viennent se poser dans des aubépines et, prudents, observent les alentours avant de descendre.
Une belle surprise, un Rouge-queue à front blanc femelle s’approche de la lavogne mais repart sans avoir bu.
Les linottes mélodieuses arrivent par petits groupes se mêlant aux autres passereaux.
D’habitude très méfiant, un geai descend boire sans trop tergiverser.
La lentille frontale du zoom effraie les oiseaux mais je m’aperçois que c’est le fait de bouger derrière l’oculaire de visée de l’appareil photo qui leur fait peur. J’utilise un reflex, si leur image parvient jusqu’à moi grâce au miroir, mon image ou du moins tout changement de lumière devant l’oculaire est aussi retransmis vers les oiseaux. Je finis par occulter le viseur avec un tissu avant de retirer mon œil de celui-ci.
Plusieurs mâles de Bruant zizi se présentent mais pas de jeune ou de femelle.
Le nom de zizi vient de l’onomatopée de son chant, simple notre répétée rapidement .
Notre cession d’affût touche à sa fin et au moment de déménager, un Bec-croisé arrive sur les arbres morts. Les chemins de l’évolution sont étranges, un raté de dame-nature en a fait un atout pour ce fringille (famille des pinsons, des linottes etc…). Comme son nom l’indique, ce passereau est inféodé aux plantations de conifères pour se nourrir, ses mandibules croisées lui facilitent l’extraction des graines des cônes d’Epicéa. Sur les Causses, ce sont surtout des plantations de Pins sylvestres, de Pins noirs que l’on rencontre, les Epicéas sont plutôt rares. Même si les Becs-croisés se rabattent sur d’autres graines comme celles des charmes, des hêtres, des érables, des aubépines, les ressources sont plutôt rares. Aussi ce ne sont que quelques couples qui nichent ici et là.
Nous aurons observé 11 espèces d’oiseaux et un chevreuil, il nous manque quelques espèces des alentours. Nous reviendrons pour d’autres surprises.
A l’heure où j’écris ces lignes, je me demande s’il reste encore de l’eau dans la lavogne avec la sécheresse qui sévit depuis début juillet !
Jean-Luc Delamare