Apollon brille sur le Méjean, 19 juin 2022
Ce dimanche matin, j’anime une sortie « Oiseaux du Causse Méjean », au Veygalier, au milieu des rochers du chaos de Nîmes le Vieux. Le vent souffle fort, le soleil brille mais la température ressentie est supportable. Très vite une belle surprise, quoique fugace, m’excite : un grand faucon sombre passe en vol, c’est un Faucon d’Eléonore !
Ce rapace, qui ne niche pas en France, est un migrateur rare. Chaque année, il passe quelques individus en Lozère. Il ressemble à un grand Faucon hobereau mais avec une queue plus longue. Il existe des formes sombres ou claires avec des intermédiaires de plumage. Il a la particularité de nicher tard en août ou septembre sur les îles et les côtes de la Méditerranée européennes et africaines. Il se reproduit à cette époque pour profiter de la manne des oiseaux migrateurs qui suivent des voies obligées comme les îles et les caps. Son nom – Eléonore – provient du nom d’une princesse sarde du XIVème siècle qui promulgua une loi pour protéger ces rapaces. Il hiverne principalement à Madagascar.
Nous repérons un Monticole de roche au sommet d’un piton mais deux promeneurs le font partir avant que tous les participants aient eu le temps de le voir dans la lunette. Les oiseaux habituels sont présents : Moineau soulcie, Traquet motteux, Pipit rousseline, Alouette des champs…
Je suis un peu déçu car les oiseaux sont furtifs, méfiants et je n’arrive pas à repérer un autre monticole. De plus, le vent empêche d’entendre les chants. Au bord du chemin, des papillons de l’espèce demi-deuil butinent des fleurs de chardons en compagnie de petits papillons des genres Hespéride et Argus quand je repère un grand papillon blanc. Me voici à nouveau tout excité : il s’agit d’un Apollon.
C’est un papillon devenu très rare dans le Massif Central et notamment sur le Causse Méjean ; il a même disparu du Causse Noir en 1989.
Sa grande taille et ses ocelles rouges cerclés de noir sur les ailes postérieures ne laissent aucun doute sur son identification. Finalement, ce sont au moins 3 Apollons que nous voyons voler. Quelle chance !
L’habitat de l’Apollon se situe en altitude sur des prairies et pelouses rocailleuses. Ses chenilles se nourrissent principalement sur les orpins, petites plantes grasses. Ce papillon est menacé par la déprise agricole et le reboisement naturel qui suit. Le réchauffement du climat supprime le froid hivernal et les couches de neige, ce qui perturbe le développement des chenilles qui peuvent alors éclore trop tôt. On s’est aperçu que l’altitude où l’on rencontre ces papillons, s’élève année après année.
Un mâle de Pie grièche écorcheur ne se laisse observer que quelques instants et nous n’arrivons pas à le retrouver. Il est temps de retourner aux voitures, c’est l’heure du pique-nique.
Allez, ne boudons pas notre plaisir : un faucon de princesse et un papillon de dieu grec, ce n’est pas si mal pour une sortie !
Jean-Luc Amon