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Tremblez campagnols ! 18 et 20 novembre 2025

Grâce à une amie, j’apprends qu’un couple d’Elanions blancs traîne avec son jeune sur le Causse Noir. C’est l’occasion d’aller observer ce petit rapace rare sur les Causses et de faire quelques photos si possible…

Pour résumer ces deux après-midi d’observations et d’affûts, je les conterai sur une journée.
Il fait beau mais froid et le vent souffle. Nous allons nous installer à l’abri d’une haie et à l’ombre pour être moins visibles. Cécile est couverte par un poncho camouflé imitation feuilles d’automne et moi je suis derrière mon trépied recouvert d’un poncho presque identique. Ce n’est pas possible d’avoir un véritable affût car les oiseaux peuvent arriver de toutes les directions et l’objectif doit être mobile ainsi que les jumelles. De plus, ces ponchos sont très légers et peu encombrants.
Je repère tout de suite un élanion de l’autre côté du champ de luzerne mais encore trop loin.

Point blanc au loin, l’Elanion

Il ne faut pas longtemps pour voir les deux autres petits rapaces : la famille est au complet.
Je ne connais pas spécialement l’organisation des familles en postnuptial. L’Elanion blanc est attaché à un territoire pendant sa nidification ; il peut, contrairement aux autres rapaces diurnes, nicher trois fois dans l’année. Ensuite, suivant la nourriture disponible, il est capable de rester sur ce même territoire ou de disparaître complètement de la zone.

Ce jeune est sans doute né sur place. Le seul couple reproducteur que je connaisse sur le Causse Noir, a niché dans le Gard à seulement 4,9 km en ligne droite. Notre observation de cette nidification en juillet dernier, m’incite à penser que nous ne sommes pas en présence des mêmes oiseaux. Les deux jeunes issus de cette dernière nichée sont maintenant indépendants.

Petit à petit, un élanion se rapproche de notre position, c’est le jeune.

Elanion immature

La bordure blanche des couvertures noires des ailes ainsi que les dessins blancs du dos, nous permettent de faire la différence entre adulte et jeune. Pour l’œil, qui ne sera pas rouge pour l’immature, il faut encore attendre qu’il se rapproche.

Plumes du manteau bordées de blanc, c’est un immature

En attendant, un crécerelle nous tient compagnie quelques instants.

Faucon crécerelle type femelle
Attention à ne pas toucher le fil et la potence sinon électrocution garantie !

Un rapace brun rase la luzerne à faible hauteur, c’est le vol caractéristique de chasse d’un busard. A cette époque de l’année, ce sont les Busards St Martin qui hantent les causses. Les Busards cendrés sont en Afrique et les Busards des roseaux sur les zones humides de l’Atlantique et de la Méditerranée.

Busard St Martin type femelle

Le plumage des Busards St Martin est très différent suivant les sexes. Les femelles sont brunes et les mâles gris avec le bout des ailes noir. En voici justement un qui apparaît mais qui repart dans une autre direction.

Même de loin, le mâle de St Martin est caractéristique

Les busards ne chassent pas à l’affût perchés sur un arbre ou un poteau. Ils volent à un ou deux mètres au dessus de la végétation scrutant le sol et aussi en écoutant les cris des micromammifères. Comme les chouettes, ils ont un disque facial, certes moins prononcé, mais qui agit comme parabole pour concentrer les sons vers les conduits auditifs.

Une femelle vient de partir sur notre gauche, une deuxième chasse au loin sur les pelouses et une troisième arrive de la droite. Nous voilà avec trois busards type femelle, c’est une belle surprise. Mais est-ce que ce sont bien des femelles car les jeunes de l’année ont un plumage très proche ? C’est pour cela que je parle de type femelle. Même en consultant l’excellent ouvrage « identifier les rapaces en vol » aux éditions Delachaux et Niestlé, j’ai du mal à différencier femelle et immature. Les immatures sont légèrement plus roux que les femelles adultes qui tirent vers le gris. De plus les oiseaux de seconde année sont intermédiaires. Sur l’image suivante, l’extrémité des rectrices est usée, ce n’est donc pas un oiseau de première année.

Cercle facial bien visible et rectrices usées
Les pattes des busards sont longues pour permettre de capturer les rongeurs dans l’herbe

Surgis de nulle part, 2 chevreuils apparaissent mais restent à distance.

Femelle à gauche, mâle à droite

Deux autres rejoignent les premiers. Quand je bouge pour photographier les rapaces, ils regardent dans notre direction mais n’identifient pas de danger.

Les nouveaux bois pointent sous la peau du mâle

Un élanion s’approche enfin. Sa méthode de chasse est assez semblable au Faucon crécerelle, il pratique le vol stationnaire pour rechercher ses proies, des rongeurs à cette saison.

Iris clair, c’est un immature
Quelques postures pendant le vol stationnaire

J’ai remarqué que les élanions une fois en chasse, mettaient beaucoup moins de temps à attraper une proie que les crécerelles. Même l’immature capture facilement des proies. Nous le voyons après une capture, perché dans un frêne mais il ne semble pas pressé de consommer sa proie. Il continue même de crier quand il voit un des adultes pour réclamer à manger.

La flèche indique le campagnol capturé par l’immature

Un crécerelle vient de capturer une proie et il a de la chance car un mâle St Martin apparaît sans essayer de le parasiter, c’est-à-dire lui ravir sa proie.

Mâle de St Martin et Faucon crécerelle
Mâle de Busard St Martin

Soudain c’est un festival de busards type femelle. Le vent fort les propulse à de telles vitesses que mon boîtier peine à les mettre au point.

Le plumage fait penser à une femelle de deuxième année
Les stries fines sur le corps me font pencher pour un immature de St Martin
Femelle de Busard St Martin

Les cris caractéristiques d’une bande de Craves à bec rouge se font entendre, ils sont rapides mais par miracle je réussis une photo. Le causse sans crave, c’est comme une journée sans pain ! (libre adaptation d’un proverbe paysan).

Craves à bec rouge (montage du même oiseau)

Cécile a froid aux pieds et aux mains, la lumière baisse, il est temps de plier le camp. Pas tout de suite, le mâle de St Martin vient de réapparaître. La vitesse d’obturation de mon boîtier descend, les photos seront floues, inutile de rester plus longtemps.

Le plus élégant des rapaces après le Busard cendré
Mâle de Busard St Martin
Camouflage léger

Nous revenons à la voiture garée en plein vent et ne mettons pas longtemps à nous y abriter. La température extérieure est de 0°.
Quelques nuages légers se teintent de rose et d’orange, nous nous arrêtons pour les immortaliser.

Coucher de soleil du 18 novembre

Vous pouvez consulter sur ce site un article intitulé « un migrant bien implanté » du 07/09/23, traitant des élanions.

Nous revenons sur le site une semaine après avec une amie mais la lumière n’est pas fameuse pour la photo. Finalement nous comptons 4 élanions, il y a 2 immatures mais pas de festival de St Martin, un seul type femelle.

Montage rapide d’une escarmouche entre l’élanion et le crécerelle

Jean-Martin Dumanteau

Jean-Luc